samedi 17 janvier 2009

Assiette Beaujolaise.



Je trempe ma fourchette dans mon plat de
saucisson pistaché tentant vainement de piquer la peau que
je ne parviens qu’à peine à effleurer, de cet hymen bouilli
qui flotte dans l’assiette comme un cordon ombilical mal
coupé. Au fond un petit pâté de pomme de terre me
rappelle les gratins de ma mère, le four à pain en brique et
le crépi des années soixante-dix dans la salle à manger. La
nuit recommence à taper aux vitres avec son cortège
d’oubliés. Dans le silence des allées, chacun cherche
l’inspiration à sa vie, d’aucun s’en étourdissent d’autres se
noient dans les murs. Préciosité que d’être l’intérêt même
superficiel de quelqu’un. La finesse est un tel trait de génie
qu’elle peut même être guetté dans nos lourdeurs. Dehors
le caniveau grossit au fur et à mesure que la nuit tombe
seuls les pas sont là pour nous rappeler la dureté de la vie,
mais n’est ce pas celle de nos idées. Ce qu’il y a de
pernicieux dans les idées c’est qu’elles nous éclairent
comme nous assombrissent. Ah ! si seulement nous avions
un guide qui nous permette de zig zaguer sans jamais
tomber. Un guide qui nous permette de voir plus loin que
notre science nous le permet, un guide qui nous permet de
voir le jour se lever derrière la nuit, un guide qui toujours
ou que nous soyons soit toujours avec nous si tant est que
nous nous tournions vers Lui ...
Épouvantable silence dans lequel nous entendons nos
souvenirs hurler de ne pas les oublier. Je regarde ma
montre, il est … l’heure de rentrer. Le froid vif me saisit,
dans la nuit noire qui vomit, je fixe ce ciel sans fin et peu à peu
apparaissent une à une les étoiles et leurs écris. Les
constellations, écriture des anges, les frêles et
imperturbables rayons de lumière nous guident depuis des
millénaires déjà là avant nous, ils en savent d’avantage
qu’une vie ne saurait en connaître. Ils brillent pour qui sait
les regarder, ils sont là même quand les étincelles du jour
nous aveuglent, toujours là que nous le sachions ou non,
ils sont là. Je remonte mon col et bois une gorgée d’air
glacé en trottinant pour mieux me contempler. En face
telle une gondole vient cahin-caha un personnage les deux
chagrins fichés dans ses poches se regardant dans les
vitrines pour s’assurer de la validité de sa tristesse n’y
croyant plus lui-même tant elle est oubliée. Quelque part
dans une autre rue sombre, elle se dandine pour se rappeler
le temps où elle plaisait au monde entier avant qu’il ne la
couvre de son chagrin. Tout est éteint c’est à tâtons qu’il
faudrait se retrouver mais elle ne pense à rien d’autre que
son passé laissant là ses erreurs futures. Au loin la nuit, le
caniveau et la rue s’enfuient déjà le jour à nouveau
bruyamment pointe à l’horizon.

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